« Qui peut prétendre faire du rap sans prendre position ? «
Cette phrase devenue culte est tirée de « Boxe avec les mots », du groupe Ärsenik (Lino et Calbo) sortit en 1998. Un classique du rap français dans lequel ils revendiquaient notamment le fait de «fuir le non-sens comme un virus». Car oui, dans l’antiquité, il était possible de « faire des tubes » qui pouvaient à la fois, parler aux jeunes et porter des messages parfois très engagés.
Je me souviens aussi de l’année 2004 où Psy4 de la rime sortait « Le monde est stone » dans lequel le groupe marseillais dressait un paysage géopolitique et social des plus moribond. Et, pourtant, croyez-vous que ce titre ne fût pas calibré pour être diffusé sur les ondes ? C’était une autre époque… Et quand on avait 14 ans en 2004, il était presque impossible de passer à côté de ce morceau résolument engagé, tant il passait abondamment sur les radios qui ciblaient la jeunesse.
Autre succès, la même année, pour « relève la tête », un titre à l’initiative de Kery James qui ne rassemblait pas moins d’une vingtaine de rappeurs et chanteurs qui venaient, de leur côté, équilibrer l’état du moral en encourageant la jeunesse à s’émanciper sur le plan intellectuel….
Je précise par ailleurs que je n’oublie, évidemment pas, tous ces artistes qui n’ont pas attendu 1998, ni ceux qui s’illustrent actuellement par leur prise de position et qui ont, à leur façon, contribué à faire évoluer les mentalités (pour certains même au péril de leur vie). Alors ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit hein ! Non mais.
Sauf que voilà, nous sommes en 2022 et cette courte introduction, empreint d’une légère nostalgie (que je veux remédiable) me permet aisément d’amener le sujet du jour, à savoir :
Mon opinion sur la question de l’engagement politique des artistes.
Premièrement, je pense que la démarche qui consiste à écrire des textes dans le but de les enregistrer, de les imprimer ou de les publier de manière à les « immortaliser » n’est pas une chose anodine et que par conséquent un auteur ou un parolier devrait de toute façon porter une attention toute particulière au message qu’il envoie.
Deuxièmement, un artiste est un être humain et un citoyen comme les autres. Un citoyen qui a la particularité de s’exprimer à travers son art. Souvent, il observe, il vit et ressent des émotions qu’il s’évertue à retranscrire dans ses œuvres. Et puisque nous ne sommes jamais seuls à ressentir ce que l’on ressent, il me semble important que des artistes puissent exprimer leurs sentiments dans des œuvres vouées à être rendues publiques.
Pourquoi ?
Parce que d’une part, ils disposent d’un pouvoir réconfortant auprès des personnes qui ressentent, pensent ou ont déjà ressenti et pensé ce qui est exprimé à travers l’œuvre.
D’autre part, ces œuvres peuvent également être utiles à ceux qui ne s’y identifient pas. Soit pour développer leur empathie, soit à titre informatif, de contradiction ou de tout autre aspect constructif.
Bien sûr, tout cela est valable pour les opinions « politiques » qui, de plus, peuvent arriver aux oreilles des gouvernants à qui on reproche souvent d’être déconnectés du peuple.
En parlant des gouvernants… on peut rétorquer que par essence, la musique stimule nos émotions et qu’elle est par conséquent susceptible de compromettre l’objectivité de celui qu’elle enivre. Mais en démocratie, même les représentants politiques ont recours à des discours plus ou moins théâtralisés dans lesquels ils usent de diverses figures de style pratiquées dans les arts littéraires. Mais ce n’est pas tout, c’est leur image tout entière qui est retravaillée. Des musiques sont composées pour leur arrivée sur scène lors de leur meeting, la propagande électorale ne laisse place à aucune spontanéité hasardeuse, les couleurs sont méticuleusement choisies et leurs slogans sont le fruit d’une profonde réflexion tout comme le choix de la photo du candidat qui y sera (ou non) apposé. Doit-il arborer un sourire ou un air grave ? Et sa coiffure, parfaitement peignée ou légèrement hirsute… ?
Est-ce regrettable ? Cela mérite réflexion, mais le plus important à mon sens est que chacun dispose du même accès à la liberté d’expression. Après tout, si un artiste auteur est en désaccord avec les paroles d’un confrère, rien ne l’empêche de s’exprimer à son tour à travers ses propres textes…
Stéphane